Je réponds ici à Lucien, en espérant ne pas trop encombrer les boîtes mail ... Je résume un peu la réflexion, en vous faisant cette fois grâce des sources, mais je peux les récupérer et les transmettre sur simple demande.
Comme toutes les sciences, l’économie a toujours été traversée par divers courants de pensée, dont le rapport de force à un certain instant peut être une certaine définition de la discipline à cet instant. C’est ainsi que certains principes anciens (la théorie dite classique), établis au XIXème siècle par David Ricardo, ou par Léon Walras en France, se peu à peu devenus constitutifs (moyennant certaines mises à jour) d’une "science économique" qui se veut l’alpha et l’oméga de l’économie (et se présente, voire s’impose comme tel). Des salles de marché aux ministères, en passant par l’université et les médias, c’est cette théorie néo-classique qui est archi-dominante. La vision qui nous est transmise des problèmes économique est donc toute empreinte des présupposés de cette théorie (qui sont bien souvent inconscients chez ses praticiens). Or cette théorie a une forte inclinaison économétrique, puisqu’elle fonctionne principalement en cherchant à modéliser
les comportements ; en postulant la rationalité anticipatrice des agents, elle prétend (parfois sans le savoir) que nos décisions sont informées, rationnelles et fondées sur la maximisation des bénéfices ; pour faire simple, que nous sommes de petites calculettes ambulantes. Le tout élevé au rang de "science dure" par l’utilisation de modèles mathématiques complexes, qui ont en général le bon goût de confirmer les hypothèses de départ ... qu’on a incluses dans le modèle !
Quel rapport avec nous ? Il me semble que cette vision de la chose économique comme une affaire de gestionnaire, de raison froide et d’analyse pure, visant à équilibrer la colonne "recettes" et la colonne "dépenses" a largement pénétré la société, et en particulier la classe moyenne que nous sommes. Cet "angle économiciste" déshistorise et dépolitise l’analyse, et tend à nous enfermer dans une pure logique comptable, où l’on perd de vue l’objet même de ce qu’on cherche à construire (les principes, l’histoire, les rapports de force en présence, etc.). Je reviens donc à ce que j’écrivais hier (certes un peu rapidement) : je vois bien que la caricature de débat économique que je dépeins n’a rien à voir avec ce qui s’échange ici (et du coup je suis un peu désolé d’en faire des tartines à ce sujet ...), mais c’est une pente très encouragée par l’ambiance actuelle des discussion économiques, et je suis content que nous y prenions garde.
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